CONGÉS PAYÉS ET MALADIE : L’amendement adopté par les députés

Sommaire

    Le droit du travail français sera bientôt conforme au droit européen sur la question de l’acquisition des congés payés en cas d’arrêt maladie. Une première étape a été franchie avec l’adoption en première lecture le 18 mars 2024, par l’Assemblée nationale, du projet de loi qui intègre l’amendement du gouvernement modifiant le code du travail. Le texte pourrait être définitivement adopté fin avril-début mai, après un passage en commission mixte paritaire.

    Pour rappel, actuellement, le code du travail ne permet pas au salarié d’acquérir des congés payés durant un arrêt de travail pour maladie non professionnelle. Il limite également à la première année de travail, l’acquisition de congés payés durant un arrêt de travail pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle. N’étant pas conformes au droit européen, la Cour de cassation a “censuré” ces dispositions dans ses arrêts du 13 septembre 2023. Le gouvernement avait alors annoncé une mise en conformité du droit du travail français. L’amendement qui modifie le code du travail a été validé le 18 mars 2024.

    les nouvelles règles envisagées:

    Arrêt maladie : L’amendement permet l’acquisition de congés payés durant un arrêt maladie :

    • 2 jours ouvrables par mois (contre 2.5 jours ouvrables de CP en cas de travail effectif) ;
    • maximum 24 jours ouvrables, soit 4 semaines, en cas d’arrêt maladie sur toute l’année de référence (contre 5 semaines de congés payés en cas de travail effectif sur toute l’année) ;

    Calcul de l‘indemnité de congés payés en arrêt maladie : La rémunération correspondant aux périodes d’arrêt maladie ne sera prise en compte qu’à hauteur de 80%. En effet un mois d’arrêt maladie ouvrirait droit à 2 jours ouvrables de CP, soit 80% de 2.5 jours ouvrables. Le même rapport de 80% pour le calcul de l’indemnité de congés payés sera donc appliqué.

    Arrêt pour Arrêt de travail ou maladie professionnelle : La limite temporelle à l’acquisition de congés payés durant un arrêt de travail pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle est levée. L’acquisition de congés payés se ferait donc sur toute la durée de l’arrêt de travail, même si celui-ci excède 12 mois.

    Le salarié aurait droit, sans changement, à 2.5 jours ouvrables de CP par mois d’arrêt, soit 30 jours ouvrables de CP en cas d’arrêt sur toute l’année de référence (5 semaines de congés payés).

    De ce fait, le salarié en arrêt de travail pour AT/MP serait mieux traité que le salarié en arrêt maladie en matière d’acquisition de congés payés. Il en est de même concernant le calcul de l’indemnité de congés payés.

    Période de report pour les congés payés acquis et non pris en raison d’un arrêt de travail : L’amendement adopté institue une période de report de 15 mois pour prendre les congés payés acquis et n’ayant pas pu être posés au cours de leur période “normale” de prise, en raison d’un arrêt de travail qu’il soit d’origine professionnelle ou non.

    Cette durée de report de 15 mois serait un minimum légal. Elle pourrait être augmentée par un accord d’entreprise ou d’établissement, par une convention ou un accord de branche.

    Report des congés payés acquis pendant un arrêt de travail de longue durée: Pour le salarié en arrêt de travail depuis au moins 1 an à la fin de la période d’acquisition des congés payés, les congés payés acquis au titre de cet arrêt pourraient être reportés sur une période de 15 mois.

    Cette période débutera à compter du terme de la période d’acquisition concernée.

    De ce fait, la période de report de 15 mois pourrait donc démarrer alors que le salarié est toujours en arrêt de travail et elle débuterait dès la fin de la période d’acquisition des droits.

    • Si le salarié reprend le travail avant l’expiration de la période de report de 15 mois, celle-ci serait suspendue jusqu’à ce que l’employeur remplisse son obligation d’information sur les droits à congés payés du salarié et indique la date jusqu’à laquelle il peut les prendre.
    • Si le salarié reprend son travail postérieurement au terme de la période de report de 15 mois, il perdra ses droits à congés payés.

    Ainsi en cas d’arrêt de travail se prolongeant ou d’enchaînement d’arrêts de travail, le salarié ne pourrait pas accumuler indéfiniment les droits à congés payés acquis pendant ses arrêts de travail.

    Information du salarié de retour d’arrêt sur ses droits à congés payés : À l’issue d’une période d’arrêt de travail pour maladie ou accident (professionnel ou non), l’employeur serait tenu de porter à la connaissance du salarié, dans les dix jours suivant sa reprise du travail, les informations suivantes :

    • Le nombre de jours de congé dont il dispose;
    • La date jusqu’à laquelle ces jours de congé peuvent être pris.

    Cette information devrait être réalisée par tout moyen conférant date certaine à sa réception.

    Cette nouvelle obligation d’information à la charge de l’employeur aurait pour principal objectif de fixer le point de départ de la période de report des congés payés.

    Rétroactivité des nouvelles règles à compter du 1er décembre 2009 : L’amendement adopté prévoit une application rétroactive :

    • de la règle d’acquisition de congés payés durant un arrêt maladie, dans la limite de 2 jours ouvrables par mois et 24 jours ouvrables par an;
    • de la période de report des congés payés de 15 mois;

    Cependant l’amendement ne prévoit pas d’application rétroactive de la suppression de la limite d’1 an pour l’acquisition de congés payés durant un arrêt de travail pour AT/MP.

    L’amendement précise également que le salarié qui a été en arrêt maladie quelques mois dans l’année, ne peut pas bénéficier de plus de 24 jours ouvrables de congés payés par année d’acquisition.

    EXEMPLE : Un salarié a été en arrêt maladie durant 4 mois et à travaillé 8 mois.

    il a acquis 20 jours ouvrables de CP au titre de son travail effectif (2.5 jours de CP mensuels X 8 mois).

    Ne pouvant avoir plus de 24 jours ouvrables de congés sur l’année, il ne pourra réclamer que 4 jours de CP au titre de l’arrêt maladie et non 8 (2 X4).

    Délai de 2 ans à compter de la loi pour faire valoir en justice ses droits pour le passé : Le salarié toujours en poste dans son entreprise qui souhaiterait réclamer à son employeur des droits à congés payés au titre d’arrêt(s) maladie survenu(s) depuis le 1er décembre 2009 aurait 2 ans pour saisir le juge, à compter de la date d’entrée en vigueur de la future loi.

    Le salarié qui aurait quitté l’entreprise auprès de laquelle des droits à congés payés pourraient être réclamés pour le passé se verra appliqué la prescription des salaires de 3 ans qui joue pour les actions en paiement d’indemnités compensatrices de congés payés (règles de prescription de droit commun).

    Ainsi le salarié dont le contrat de travail a été rompu depuis plus de 3 ans à la date d’entrée en vigueur de la future loi ne pourrait pas agir en justice pour obtenir le paiement d’indemnités compensatrices.

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